METZ

 

 

La communauté juive de Metz se distingue par son ancienneté, la grandeur de son passé et son rayonnement spirituel.

Même si la présence des juifs à l'époque romaine est probable, la première mention de leur existence, sans doute en nombre, dans notre ville, remonte à 888, lors d'un concile les attaquant. Les juifs, à cette époque, sont marchands, cultivent la terre et possèdent des vignes.
Ils vivent jusqu'au XIème siècle sous la protection de l'évêque et habitent la Jurue (rue des juifs).

Metz est un foyer d'étude de la Loi. Vers 960 naît dans notre ville Rabbénou Guerchon. Son prestige dans le monde juif lui valut le titre de " Lumière de l'exil ". Il fait figure de chef spirituel des juifs de l'époque. Ses décisions, dont l'interdiction de la polygamie en Europe, font encore autorité de nos jours.
Cependant, la première croisade entraîna des massacres à Metz en 1096.
Vers la fin du XIIème siècle ou au début du XIIIème siècle, les juifs disparurent de Metz sans doute pour des raisons économiques.
Ils n'obtinrent l'autorisation de se rétablir à Metz qu'en 1565. Ils durent s'acquitter de lourdes taxes pour avoir le droit de résider. En 1595, une communauté fut constituée et elle acheta en 1619 un terrain pour y enterrer ses morts non loin du cimetière actuel. Une première synagogue fut établie en 1619.
Les juifs vivent sous la protection des rois de France qui leur accordent des lettres patentes mais sont souvent soumis à l'hostilité de la population messine.
Louis XIV visita la synagogue en 1657.

La communauté juive habitait le quartier de la synagogue actuelle. Elle rechercha toujours comme rabbins des érudits, souvent des contrées lointaines et fit de l'enseignement une de ses tâches prioritaires. Ceci entraîna un grand rayonnement dans le monde juif. Une école talmudique fut créée et attira des élèves de l'Europe entière.

Parmi les rabbins célèbres qui exercèrent leur ministère à Metz, il faut citer Jonathan ELBECHITZ et surtout Arieh LOEW, auteur de " Schaagath Arieh " dont la réputation fut et demeure immense chez les étudiants de la Torah. Sa pierre tombale est dans le cimetière actuel.

La communauté se gouvernait elle-même et formait un état dans l'état. Elle possédait son gouvernement, son tribunal, sa synagogue, ses commerces, ses confréries charitables et ses médecins.
La situation des juifs s'améliora légèrement avant la Révolution.
En 1787 pour son concours, la Société royale des arts et des sciences de Metz posa la question suivante : " Est-il un moyen de rendre les juifs plus heureux et plus utiles en France ? ".
Après quelques péripéties, l'Académie décerna trois prix. Parmi les lauréats figurait l'abbé GREGOIRE.

Devant les Etats Généraux de 1789, les juifs de Metz, de Lorraine et d'Alsace réclamèrent les mêmes taxes que les citoyens, la liberté d'établissement, d'occupation, de propriété et de culte en conservant leur organisation.
Les juifs de l'Est n'obtinrent la citoyenneté française qu'en 1791.
Le Culte de la Raison entraîna la fermeture de la synagogue. Les juifs de Metz traversèrent les rigueurs de la terreur et se réorganisèrent après.
La communauté juive mit plusieurs années à rembourser ses dettes pour payer les taxes de l'Ancien Régime.

Napoléon eut une attitude ambivalente à l'égard des juifs. Il organisa le culte et créa le Consistoire central et les Consistoires départementaux dont celui de Metz.

En 1821 est ouvert une école talmudique qui va devenir l'école rabbinique de France en 1829. Malgré les résistances locales, cette école fut transférée à Paris en 1858.
L'actuelle synagogue fut inaugurée en 1850.
L'annexion allemande de 1870 entraîna le départ de nombreuses familles.
Mais dès le début du XXème siècle arrivèrent à Metz des juifs d'Europe centrale. Cette immigration augmenta a^rès l'armistice de 1918. Les juifs des villages de Moselle vinrent aussi en nombre à Metz.
Malheureusement, l'invasion nazie provoqua la déportation et la mort de plus de 2000 hommes, femmes et enfants.
Parmi les rabbins de ce siècle, il faut évoquer le souvenir de Nathan NETTER qui fut le Grand Rabbin à Metz pendant plus de 50 ans et d'Elie BLOCH qui fut le rabbin de la jeunesse et périt avec sa femme et son enfant en déportation.
Au lendemain de la guerre, la communauté juive se reconstitua. Elle vit l'arrivée des juifs d'Afrique du Nord dans les années 62. C'est une communauté soudée et dynamique qui se souvient de son grand passé mais fait de sa jeunesse un gage d'avenir.


D'après N. NETTER - S. LANDMANN - P. MENDEL

Jean-Marc KRAEMER

La synagogue "Adath Yechouroun"

Un aperçu historique sur l'émigration des juifs de l'Est à Metz

C'est au début du XIXème siècle, que l'on trouve quelques familles d'origine polonaise ou galicienne à Metz : sept en tout.
Dans ce petit groupe vivait un homme très pieux, M Mosche BLEITRACH qui est devenu par la suite le patriarche de cette nouvelle Communauté.
Le rite synagogal avec choeurs et orgue ne convenant pas à la piété de ces familles, elles organisèrent un office pour se recueillir dans leurs prières.
Grâce au soutien du Consistoire Israélite de la Moselle, l'ancien chauffoir " Halfhen " fut mis à leur disposition afin d'en faire une maison de prières.

En 1912, il y avait déjà à Metz, toute une colonie de nouveaux immigrés et à cette époque fut constituée " l'Adath Yechouroun ".

A la déclaration de la première guerre mondiale, la situation commençait à s'assombrir ; les juifs autrichiens avaient été appelés sous les drapeaux et les Polonais ou les Russes envoyés en France ; après la guerre en 1920, le courant de l'immigration en Alsace-Lorraine devint très actif ; les nouveaux arrivés avaient déjà des attaches à Metz ; leurs professions étaient multiples : tailleurs, cordonniers, peintres en bâtiment, boulangers, ferblantiers, coiffeurs, commerçants, voyageurs ou marchands.

Il y avait à Metz 5 offices ; parmi ceux-ci les " Schromé Schabess " sous la conduite de feu le Rabbin Kahlenberg. Les sociétés de bienfaisance et sportives étaient nombreuses.

La guerre de 1939 chassa nos frères de leurs foyers ; la Communauté Juive de Metz fut durement frappée par les nazis ; plus d'un tiers de ses fidèles furent exterminés et ne revinrent jamais de leur déportation.

En 1945 un tout petit groupe de " revenants " arrive à Metz.
Il n'y trouve que dévastations et désolation. Des 5 lieux de culte, il ne reste que l'Adath Yechouroun et dans quel état, pillée, ruinée.
Sous le patronage de Messieurs Marc FUHRMANN , Mendel BANDA et Nathan PRAGER, il fut procédé à la constitution d'un " COMITÉ POUR LA RECONSTRUCTION DE L'ADATH YECHOUROUN ". Grâce au dévouement physique et financier de tous les membres, la Maison de Prières a été rebâtie, et une plaque commémorative de nos morts, victimes du nazisme a été placée à l'intérieur du temple.

A ce jour, cette synagogue est une des rares de ce rite encore en activité en France. Il faut rappeler le souvenir du Rav Marc HEISELBECK (ZAL) qui depuis la Libération jusqu'en 1970 a présidé aux destinées religieuses et depuis 1971 cette synagogue est sous la responsabilité du Dayan, Rav Maurice BAMBERGER.

Henry SCHUMANN